Laurence Honoré est menuisière. Ou menuisier, elle n’a pas tranché. Pas plus d’ailleurs qu’elle n’avait tranché entre avocat et avocate, son précédent métier. Récit d’une reconversion professionnelle réussie, de la robe au rabot.

 

Depuis le siège châtelaillonnais de Kabane, sa toute jeune société, Laurence Honoré, la quarantaine, reconstitue au fil de la conversation les quelques signes ténus qui racontent a posteriori le cheminement lent, sinueux, qui l’a amené à abandonner la fréquentation des parquets pour la construction des terrasses. « Je me souviens, d’abord, avoir toujours bricolé aux côtés de mon père, explique-t-elle, et je me souviens également avoir apprécié le moindre espace aménagé du camping-car avec lequel nous avions traversé, en famille, le continent américain du sud ou nord en 2006. Elle conclue en riant : je crois qu’il y avait un terrain propice.

Avocat·e

Au moment de choisir une orientation, c’est pourtant le droit que la jeune étudiante rennaise décide d’embrasser, « j’étais la petite dernière, je marchais bien à l’école, la logique parentale voulait que je fasse des études, hasarde-t-elle. Au terme de sa formation universitaire, Laurence entame très naturellement une carrière d’avocate d’affaires, sept années durant, dans un cabinet mulhousien puis niortais. La voie semble tracée, plutôt linéaire. Mais les meilleurs tracés achoppent parfois sur des nœuds. Des événements familiaux amènent la jeune professionnelle à remettre en question ce parcours mené tambour battant, que d’aucun trouverait exemplaire. Dans ces moments de doute, ressurgissent les bricolages d’enfance et les souvenirs d’aventure. Nous sommes faits de bois tendre.

 

Apprenti·e

En 2014, Laurence franchit le pas et décide de passer un CAP de menuiserie, « il me fallait un diplôme. J’ai appelé les Compagnons du Devoir, à Périgny, qui ont d’abord cru que j’appelais pour mon fils. Mais il n’avait que huit ans, plaisante-t-elle, quand ils ont compris que c’était pour moi, il m’ont acceptée sur le champ. La motivation d’une jeune apprentie de quarante ans suffit à ouvrir les portes des ateliers. » Laurence bénéficie d’un congé individuel de formation et poursuit son nouveau cursus par un Brevet Professionnel, qu’elle obtient en 2017. Sûre désormais de son choix, elle a entre-temps quitté définitivement son ancien employeur, « globalement, ma reconversion a été bien acceptée. Certains anciens confrères m’avouent même être un peu envieux. »

Menuisier·ère 

Laurence fait ses premières armes chez Littoral Concept, une menuiserie de l’île de Ré, « j’étais très contente de travailler pour eux mais je sentais bien que je n’avais pas fait tout ce chemin pour être à nouveau salariée. J’attendais plus. » Elle s’engage dès lors dans la création de son entreprise, bénéficie de l’aide réactive du Crédit Mutuel par l’intermédiaire d’un prêt d’honneur, investit un atelier au sein de la pépinière La Fabrique à Périgny et pimpe un beau camion rouge aux couleurs de sa société, Kabane, qu’elle inaugure en septembre 2017. Kabane fait de la menuiserie d’agencement, de la cuisine à la terrasse en passant par le meuble personnalisé. Une affaire rondement menée. Qui ne s’arrête évidemment pas là…

Formateur·trice

De son parcours singulier, Laurence a en effet retenu tout ce que l’apprentissage du geste a de formateur. Elle fait donc de Kabane plus qu’une menuiserie : une menuiserie participative, « ce qui veut dire que le client, s’il le souhaite, peut m’aider sur son chantier. Le plus souvent, les gens ont envie de faire par eux-mêmes mais ils n’osent pas, faute d’outils, faute surtout de savoir bien faire. Avec Kabane, je leur apprends les bons gestes et ils sont assez fiers de construire leur terrasse, par exemple. Accessoirement, le prix de leur chantier baisse un peu » explique la cheftaine d’entreprise.

Ce talent pour la transmission, Laurence le déploie également lors de stages « bois » pour enfants, avec l’idée d’apprendre de façon ludique, mais rigoureuse, quelques petites techniques de menuiserie, et d’aider les enfants à réaliser ainsi leurs premiers objets. Ses propres enfants ont déjà contribué à convertir quelques copains et copines à ce nouveau loisir original et intelligent. Sous la houlette de leur maman, nul doute que Romane, Émilie, Charly et Sarah retrouvent, là, dans le fil du bois, la mémoire de quelque geste grand’paternel. Le menuisier ne pouvait pas trouver meilleure avocate.
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Tags : Charente Maritime, Économie, Artisanat